jeudi 8 décembre 2005
Discrimination
On parle beaucoup, en ce moment, de discrimination raciale. De temps en temps, on parle de discrimination sexiste. Mais rarement de discrimination liée au handicap.
Elle est plus insidieuse.
Quand le handicap est absent de votre vie, vous ne pouvez pas vous imaginer que cette discrimination existe, et puis, comme tout le monde, vous vous en fichez un peu.
Quand il est là, c'est une autre paire de manches! Vous devez déjà vivre avec le fait que votre enfant va mourir (n'ayons pas peur des mots), mais, en plus, il faut presque "justifier" sa vie.
Passons sur la commisération habituelle :"Vraiment c'est dommage, on ne dirait pas qu'elle est en retard, patati, patalère...Elle est si mignonne(Non, pas toujours)..etc..
Il faut néanmoins que nous ne gênions pas! Je m'explique : je voulais scolariser ma fille en maternelle dans mon village; c'était en 2004, la fameuse année du handicap si mal nommée! Réponse: pas d'AVS (auxilliaire de vie scolaire), pas de sous pour en payer une; qu'à cela ne tienne: ELA propose d'en payer une: Refus de l'éducation nationale!!! "De toute façon, madame, l'école n'est obligatoire qu'à partir de 6 ans" Voilà, prends ça et mets ton mouchoir par dessus.
Autre couleuvre à avaler: je n'ai plus de boulot, car une infirmière ne peut que commencer de bonne heure, quand elle n'a pas de piston pour un poste aménagé (car rien n'est un dû :dans certaines administrations, il faut être pistonné); donc, si je veux être avec ma fille (elle ne part au Centre qu'entre 8h et 9h et reviens entre 14h et 17h, ça dépend des jours), il vaut mieux ne pas travailler; mais si je ne travaille pas, je perds des aides financières (je ne peux même pas expliquer pourquoi, car je n'ai pas compris le processus, je dois être bouchée). Heureusement, après négociation de l'AS de la CDES qui accorde les fameuses aides, elles ont été maintenues malgré le fait que je ne travaille plus.
Je suis une grosse feignante, pour l'administration!!
Rien, non plus, n'est adapté pour les handicapés. Je passe sur les places réservées: même en face du Centre, elles sont occupées par des personnes qui vont chercher leur pain (il y a une boulangerie en face) et quand vous rouspétez et demandez à ce qu'ils aillent plus loin, vous vous faites insulter!! A l'église, on vous envoie presque paître quand vous vous installez devant avec la poussette pour être plus à l'aise (c'est plus large); non! il faut aller derrière! et celui qui m'a virée est censé être un super-catholique!! Super-bigot, oui!
Ne se plaindre à personne, surtout! Des âmes bien intentionnées m'ont dit qu'il existait des Centres où les enfants comme G. étaient "relégués": on les met là et hop! On n'en entend plus parler et le vie peut continuer!! (en écrivant ces dernières phrases, je pleure)
Et puis là, ce matin, ce qui a déclenché l'envie d'écrire ce billet, le taxi qui me dit (en voulant sûrement me faire plaisir) :"les parents d'Unetelle (une petite camarade de Gabrielle qu'il prend le jeudi) sont épouvantables, l'année prochaine, on ne s'en occupera plus"; je lui ai quand même dit que c'était très dur d'être parent d'un enfant handicapé, mais bon. Encore un exemple de ce que nous devons entendre tout en gardant le sourire (ne pas trop râler, surtout, car on vous tourne le dos vite fait! si vous êtes catalogué "parents chiants", c'est foutu pour la petite! Tout est dans la manoeuvre en douceur! Malheureusement, je ne suis pas très douée)
Je ne souhaite qu'une seule chose: que les gens cessent de traiter nos enfants comme du mobilier et leur parlent, car même si ils ne peuvent pas répondre, souvent ils comprennent plus qu'on ne croit.
Je connais des gens (dans ma propre famille aussi) qui ne veulent plus me parler parce que ça leur fait trop de peine que mon enfant ait une maladie génétique, donc il vaut mieux me fuir, il y en a même qui ont rendu Gabrielle responsable du fait qu'ils aient eu un enfant mort-né (la maman a été trop contrariée quand elle a vu Gabrielle).
Véridique.
Il y a tant d'autres exemples. Parfois, j'en crève.
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Ce premier billet que je lis est très touchant. Je n'ai rien a y ajouter, ou peut-être mais les mots ne me viennent pas.
La lacheté est une pratique courante, je la pratique aussi parfois mais telle que décrite ici elle relève d'une cruauté.
Quand au pourquoi d'un blog... Et pourquoi vit-on, pourquoi justifié une naissace ou l'amour? On devrait juste justifié certains dires, ça serait déjà du bon travai, non... ;-)
je ne suis pas toujours aussi négative. Je suis heureuse, en fin de compte, d'avoir commencé ce blog, car il me permet de rencontrer virtuellement des gens aussi interessants que Holly et vous (j'ai fait un saut sur votre blog, si, si!!), alors qu'on se raterait dans la vie hors réseau.
Difficile de dire aux autres qu'on les comprend, qu'on les aime...
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